lundi 16 avril 2012

41 Le besoin de punition dans la littérature

Je suis en voyage avec ma petite famille. Alors je n’ai pas le temps d’écrire moi-même et je me repose un peu sur grande dame de la littérature féminine Charlotte Brontë. Voici donc un joli texte troublant qui montre sous quels aspects un besoin de punition peut se montrer.


"Elle me parlait français et je la grondais bien fort; j'essayais de la punir; mais il fallait que le, châtiment ne fût pas très judicieux, car, loin de réprimer la faute, il semblait, au contraire, la pousser à la récidive.

Nos soirées nous appartenaient complètement; nous en avions besoin pour retremper nos forces et rafraîchir notre esprit. Nous les passions quelquefois à causer; et, maintenant que ma jeune Suissesse aimait trop son professeur d'anglais pour le craindre, il lui suffisait de penser tout haut et d'épancher son cœur pour que la conversation fût aussi animée qu'intarissable. Heureux alors comme deux oiseaux sous la feuillée, elle me montrait les trésors de verve joyeuse et d'originalité que renfermait sa nature. Parfois, laissant jaillir la malice que recouvrait l'enthousiasme, elle raillait, la méchante, et me reprochait ce qu'elle appelait mes bizarreries anglaises, du ton incisif et piquant d'un démon qui badine en ses heures de gaieté. Toutefois ces accès de lutinerie étaient rares; et si, entraîné moi-même à cette guerre de paroles où elle maniait si bien la finesse et l'ironie de la langue française, je me retournais vivement pour prendre corps à corps l'ennemi qui m'attaquait, vaine entreprise ! je n'avais pas saisi le bras du lutin qu'il avait disparu ; l'éclair provocateur avait fait place à un regard plein de tendresse qui rayonnait doucement sous des paupières demi-closes; j'avais cru m'emparer d'une fée maligne, et je trouvais dans mes bras une petite femme soumise et suppliante."

Extrait du roman « Le professeur » de Charlotte Brontë (page 282).

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